Toutes les critiques de Loving

Les critiques de Première

  1. Première
    par Frédéric Foubert

    Immense cinéaste lyrique ou petit maître indé ? Nouveau génie de la mythologie sudiste ou humble artisan de mélo intimes ? On attendait Loving pour se faire enfin une idée. A ce jeu-là, c'est une déception. 

    Michael Shannon, l’acteur fétiche de Jeff Nichols, ne joue que 5 minutes dans Loving. Mais il se débrouille quand même pour hériter de la plus belle scène, dans la peau d’un photographe de Life venu immortaliser Richard et Mildred Loving dans leur petite bicoque de Virginie. Dans les années soixante, ce couple était devenu l’un des emblèmes de la lutte pour les droits civiques, en décidant de se marier alors que les lois de leur Etat interdisait les unions « interraciales », puis en portant leur cause devant la Cour Suprême, qui finit par changer la Constitution. La photo en question – Richard posant tendrement sa tête sur les genoux de Mildred, tandis que le couple regarde la télé en riant – illustra un article intitulé « The Crime of Being Married ». On voit Michael Shannon prendre ce cliché dans le film. Il est assis par terre, tapi dans un coin du living-room, et parvient à saisir cet instant fragile discrètement, sans un bruit.

    Ce photographe qu’on remarque à peine, c’est bien sûr l’alter-ego du cinéaste lui-même. Sa douceur et son tact sont ceux avec laquelle Nichols a décidé d’aborder cette histoire. Il ne voulait pas trop en faire. Ne surtout pas sombrer dans l’académisme, ou le pamphlet bruyant, ou le film à Oscars édifiant « d’après une histoire vraie ». Il slalome d’ailleurs impeccablement entre tous ces écueils. Mais à force d’être envisagé comme une profession de foi qui affirmerait en permanence la modestie de son regard, la douceur de son trait, Loving finit surtout par devenir un objet redoutablement mou, sans aspérités. Beau par endroits mais trop engourdi.

    Les deux premiers longs de Jeff Nichols, Shotgun Stories et Take Shelter, étaient tellement électrisants qu’on s’était immédiatement mis à fantasmer l’immense réalisateur que ce jeune mec de l’Arkansas allait inévitablement devenir. Il n’y avait plus qu’à attendre qu’il crève le plafond. Pourtant, aussi vibrants et inspirés qu’ils soient par endroits, Mud et Midnight Special ont surtout confirmé sa nature de « petit » cinéaste, qui se confronterait à des mythologies immenses (de Mark Twain à Spielberg), mais serait plus à l’aise dans l’idée de la miniature, du mouchoir de poche. Et pourquoi pas, après tout ? En cela, il est proche de James Gray, sauf que Gray parvient à insuffler une puissance romanesque et mythologique inouïe à ses mélodrames fabriqués avec trois bouts de ficelle. Nichols, lui, semble parfois perdu entre l’aisance avec laquelle il a défini son « territoire » de cinéma (qui est aussi un territoire géographique, celui du Sud des Etats-Unis) et ce qu’il en fait. Ou plutôt, en l’occurrence, ce qu’il n’en fait pas. Si Loving confirme certaines de ses qualités (les scènes d’exposition laconiques et excitantes, l’art de l’ellipse, un amour communicatif pour ses personnages, sans oublier tous ces moments très cools où des voitures fendent la nuit en secret), on est surtout frappé à la vision du film par le très grand nombre de scènes sans enjeux, sans idées, sans rythme. Les dialogues sont souvent plats. Les personnages secondaires, très fades, se tiennent la plupart du temps les bras ballants à l’arrière-plan. Le couple vedette, Joel Edgerton et Ruth Negga, n’est pas particulièrement passionnant à regarder. L’humilité du projet a beau être une forme d’hommage à Richard Loving (un homme de peu de mots qui fuyait les medias et voulait juste aimer en paix), elle se révèle à l’arrivée franchement contre-productive. Dans le genre « amours interdites + feeling sudiste + lyrisme en chambre », un petit film comme Les Amants du Texas vibrait beaucoup plus fort. Drôle de cinéaste, ce Jeff Nichols. Il ne nous reste pas grand-chose à faire qu’à attendre son sixième film. Qui sait ? Il finira peut-être par crever le plafond.

  2. Première
    par Frédéric Foubert

    Michael Shannon, l’acteur fétiche de Jeff Nichols, ne joue que cinq minutes dans Loving. Mais il se débrouille quand même pour hériter de la plus belle scène, dans le rôle d’un photographe de Life venu immortaliser Richard et Mildred Loving dans leur petite bicoque de Virginie. Dans les années 60, ce couple était devenu l’un des emblèmes de la lutte pour les droits civiques, en décidant de se marier alors que les lois de leur État interdisaient les unions « interraciales », puis en portant leur cause devant la Cour suprême, qui finit par changer la Constitution.

Les critiques de la Presse

  1. Le Parisien
    par Pierre Vavasseur

    Loving est un modèle de sobriété et de puissance, une pure leçon d'efficacité cinématographique huilée par un ballet de regards qui exprime comme rarement la force de l'amour, l'inquiétude, la peur, la patience et l'espoir.

  2. Télérama
    par Cécile Mury

    Ni militants, ni porte-drapeaux, les Loving sont à l'image du film : discrets, et profondément humains.

  3. Les Inrocks
    par Jacky Goldberg

    Nulle emphase ni sentimentalisme ici, mais une mise en scène carrée, sèche, d’un classicisme rigoureux (presque trop) qui retient jusqu’au bout l’émotion, comme on retient des lévriers de course sur la ligne de départ.

  4. L'Express
    par Sophie Benamon

    Jamais le film ne verse dans le pathos, ne s'attarde sur l'inacceptable de la situation. Il était facile de faire pleurer. Cette émotion retenue est, un peu, le défaut du film. 

  5. Le Monde
    par Isabelle Regnier

    Jeff Nichols ne se contente pas de filmer ses acteurs. Sa caméra les enveloppe d’un tel amour qu’elle les rend immédiatement vivants, révélant la force de leur présence au monde, et leur fragilité face à la violence aveugle qui s’abat sur eux. 
     

  6. Metronews
    par Jérome Vermelin

    Palpable lors des premières minutes, son alchimie avec sa partenaire, l’élégante Ruth Negga, se dissout au fil des minutes sur l’autel d’une œuvre bourrée de bonnes intentions. Mais bien trop sage pour nous briser le cœur.

  7. Libération
    par Didier Péron

    La mise en scène s’active à rendre quelque chose de cet héroïsme dans la banalité mais, en cherchant à raboter tous les reliefs, le cinéaste vitrifie les événements sous une couche de glacis neurasthénique et de chromos vintage.