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Cela fait dix ans que Jean-Louis Trintignant n’avait pas tourné de film. Avec Amour de Michael Haneke, l’acteur et réalisateur de 81 ans revient à Cannes ce dimanche, plus de cinquante ans après ses premiers succès, Et Dieu... créa la femme ou Un homme et une femme. Un événement qui colle parfaitement avec la sortie de Du côté d’Uzès, entretiens avec André Asséo, une biographie qui fait peau neuve ce mois-ci aux éditions Le Cherche-Midi avec un nouveau dialogue de vingt pages.Les mots que l’on retient de ce livre bouleversant sont ceux adressés à sa fille, l’actrice Marie Trintignant, décédée le 1er août 2003 après une violente dispute avec son compagnon Bertrand Cantat.  Jean-Louis Trintignant confie que cet événement a été "la plus grande souffrance de [sa] vie." "Il était impossible d'imaginer un jour sans entendre sa voix, sans voir son sourire. Rien au monde n'aurait pu m'atteindre davantage", se souvient-t-il.Avec la disparition de sa fille, qu’il qualifie de "merveilleuse", il avoue avoir perdu goût à la vie : "Pendant deux mois, je suis resté prostré. (…) J’étais incapable du moindre mouvement. (…) Deux mois pratiquement sans ouvrir la bouche, sans émettre le moindre jugement". Puis il dit qu’il a "décidé de vivre. De revivre. La poésie est venue à [son] secours. "Dans son livre, il explique avoir eu envie de venger Marie, parce qu’il avait "une complicité magnifique avec [elle]", explique-t-il, et que sa présence lui "procurait un bonheur extrême". L’idée de pouvoir tuer la personne qui lui a ôté la vie, à savoir le chanteur Bertrand Cantat, lui a souvent traversé l’esprit. "Mais je me dois de penser aux quatre enfants dont ma fille s'occupait avec tant d'amour, et je me dis qu'ils méritent autre chose que de la haine", assure Jean-Louis Trintignant.Presque dix ans après les faits, l’acteur continue à souffrir terriblement du décès de Marie Trintignant ; le deuxième pour ce père de famille, puisque en 1970, pendant le tournage du Conformiste à Rome, il a perdu une autre "petite fille qui s’appelait Pauline". "Un matin, alors que je partais tourner, raconte-t-il, je suis allé embrasser Pauline dans son berceau. Elle était morte. On n’a pas su comment. (…) J’ai dit à Nadine : ‘Soit on se suicide, soit on accepte de vivre pour Marie’."Mais aujourd’hui, sans Marie, l’acteur avoue : "Je fais semblant de vivre. Mon existence n’est que l’ombre de ce qu’elle fut jadis." Souhaitons à Jean-Louis Trintignant  de tout de même savourer sa montée des marches à Cannes dimanche prochain, aux côtés de ses partenaires Emmanuelle Riva et Isabelle Huppert. C’est dans ce même festival qu’en 1969, il recevait le prix d’interprétation masculine pour Z de Costa-Gavras. Si  Michael Haneke pouvait lui porter bonheur, ce serait le plus beau des cadeaux pour ce père meurtri.La bande-annonce du film Amour de Michael Haneke avec Jean-Louis Trintignant :