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France 2 diffusera la fin de la trilogie Le Hobbit demain soir.

La Bataille des cinq armées revient demain soir sur la deuxième chaîne. L'occasion de fouiller dans les archives. Fin 2014, Orlando Bloom nous avait confié ses impressions, au moment où se terminait la saga au cinéma.

Ca y est, l'aventure en Terre du Milieu s'achève. Ca fait quoi ? Je ne sais pas encore…. Ca a été un voyage très beau, très intense. Je ne pensais même pas faire partie du Hobbit et je ne pensais d'ailleurs pas que le film se ferait. Legolas a défini ma carrière et, naturellement, quand Peter m’a proposé de repartir pour trois films, j’étais obligé d’y aller… Je sais qu'une page se tourne, mais le moment des adieux, je n’y pense pas vraiment.

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Tu dis "Legolas a défini ma carrière". Qu'est-ce que tu veux dire exactement ? Que tu as vécu ça comme une prison ? Non, je n’ai pas dit ça… 

On en parlait au moment de Zulu. Tu évoquais l’idée de casser ton image... Hmmm, c'est vrai, mais je ne me suis jamais vu prisonnier de Legolas. 

Mais tu as cherché à y échapper...  Oui… J’ai fait Zulu précisément pour ça, pour essayer quelque chose de différent. Soyons réaliste, Legolas a été la chance de ma vie. Maintenant, je peux regarder le verre à moitié plein ou à moitié vide. Tout est une question de perspective, mais je crois être parvenu à trouver un équilibre.

Comment ? Différemment selon les moments. Après Pirates des Caraïbes par exemple, j’étais perdu. Complètement. J’ai fait une croisière de trois mois sur un bateau qui faisait des recherches en Antarctique. Ca m’a forcé à relativiser. J’ai enchaîné avec une pièce de théâtre. Une expérience très formatrice que je voyais comme un défi parce que la scène me tétanisait… 

Tu cherchais à prendre de la distance ? Oui, à sortir de l’équation. Parce que je commençais à vriller… Sérieusement. Le Seigneur des anneaux et Pirates des Caraïbes ont été d’extraordinaires expériences. Mais j’étais jeune et j’ai plongé dans un univers qui a altéré ma vision des choses. Je crois que j’ai un peu tout mélangé… Je ne faisais plus la différence entre le réel et l’aventure à laquelle je participais… J’ai commencé à jouer un jeu. A être qui les gens croyaient que j’étais. A un moment, j'ai essayé de m’adapter à l’image qu’on avait de moi. Jusqu’à ce qu’un jour je réalise qui j'étais vraiment…

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Pour en revenir à Legolas, comment a-t-il défini tes rôles ? Est-ce que ça a lancé ta carrière de comédien dans une direction particulière ? Un peu, mais le fond du problème c’était qu’il s’agissait de mon premier film. Ca m’a lancé. Point barre. Et ça a naturellement modelé la manière dont les gens m’ont vu. Pas seulement les gens du business, les spectateurs également. Legolas a capturé les espoirs et les fantasmes d’une génération de fans. Et ca a eu un impact immense sur tout. Moi, ma carrière, mes proches. Je dois tout à Legolas.

Tu te souviens du moment où Peter Jackson te parle pour la première fois du Hobbit ? On était en Angleterre et il m'a annoncé ça, comme ça. On a tout de suite beaucoup réfléchi à la manière dont Legolas pouvait revenir dans la saga. Peter y tenait, vraiment. J’étais heureux, honoré même. La question qui se posait, c’était de savoir comment faire pour que sa présence se justifie ? Comment légitimer son retour ? C’est le fils de Thranduil. Mais si Thranduil est un personnage du Hobbit, Legolas n’est pas mentionné dans le livre. Fran et Peter auraient pu utiliser n’importe quel autre elfe. L’opportunité était pourtant trop belle : on pouvait développer Legolas, explorer la relation père fils, densifier sa psychologie en créant une relation amoureuse avec Tauriel. La manière dont le personnage a été écrit dans la nouvelle trilogie l’a transformé en personnage clé. Il possède une vision historique des choses, de l'univers. Et c'est ce qui explique qu’il devienne un elfe isolé. Un elfe qui abandonne sa famille, sa tribu dans Le Seigneur... C’est très rare, même inhabituel puisqu'on sait que les elfes vivent en bande. C'est ce qui est expliqué (en partie) dans Le Hobbit.

C'est marrant... Je viens de parler à Ian McKellen et à Martin Freeman. A chaque fois, vous parlez de ces personnages comme s’ils existaient…. Oui (rires). Ca vient de notre histoire avec ces personnages, mais je crois que c’est aussi dû à la façon dont Tolkien a écrit le roman. C’est l’histoire de la Terre du Milieu. Une véritable chronique, écrite comme du Tacite. C’est comme si ces gens, ces lieux, ces événements existaient réellement... C’est ce qui en fait une oeuvre à part. J’ai été récemment au ComicCon de San Diego. Et la passion des fans est inimaginable. Tu croisent des gens qui portent des tatouages de Legolas. Tu comprends que certaines personnes se sont appropriés  cette histoire et cet univers. Ça rend d'un seul coup ces rôles encore plus présents, encore plus...

...Vrai ? Oui, en quelque sorte. Ça leur fait du bien.  

C’est à dire C’est compliqué à expliquer, mais les Elfes sont éternels, ils sont purs. Ce sont des êtres "thaumaturges". J’ai parlé à beaucoup de gens - des gens malades, ou bien touchés par un deuil. Et les Elfes ou l’univers du Milieu attirent ces personnes désespérées…

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Ce n’est pas étrange de jouer avec ce type d’émotion ? Tu n’es pas un guérisseur... Non, mais c’est touchant ! On a impact sur la vie réelle des gens. C’est très émouvant et ça te donne une responsabilité peu commune. 

Tu vois ton futur comment sans Legolas ? Tout est à écrire.  C’est une page blanche ! Je vais prendre des risques, m’immerger dans des personnages à 100%. Et puis j’ai un enfant et ça change toutes mes perspectives. Je suis un acteur, j’adore ma carrière et je veux continuer à travailler. Mais il faut aussi se calmer. Je ne suis pas un chercheur qui doit sauver l’humanité. Je ne suis pas un scientifique ou un neurochirurgien ! J’adore ce que je fais. Je le fais sérieusement, mais c'est du jeu… Ce qui va me manquer au fond, c’est Peter et cette famille 

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Tu lui montres ce que tu fais ? Zulu par exemple ? Oui. Il a adoré ! Et il m’a conseillé de continuer à faire ce genre de films, que c’était bien pour moi. Je crois qu’il a raison. Mais ce sont des films difficiles à faire. Aujourd’hui, les studios ne produisent plus que des franchises, des blockbusters. Ou alors des films indés, des films pour les Oscars. Rien entre.

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Ça n’a pas l’air de te plaire. Pourtant entre Pirates des Caraïbes et Le Seigneur des anneaux, ce genre de films a quand même assuré ta célébrité... Je ne suis pas en train de critiquer. Moi, je suis un acteur. Je raconte des histoires. Si le personnage me plait, je le fais. Sinon, je ne le fais pas. Dans Zulu il y avait Brian. Et Brian était un rôle que j’attendais depuis longtemps. C’était un cadeau. Je pouvais enfin montrer au monde un visage différent, une couleur un peu plus nuancée. C'est mon job : trouver le bon rôle. C’est tout. 

Des regrets ? Aucun. J’ai 37 ans et ma carrière est devant moi. J’ai fait deux trilogies qui ont installé une certaine image de moi, une image difficile à briser. Mais maintenant s’ouvre un second chapitre. Quelque chose de différent. De neuf. Et ça m’excite. 

Interview : Gaël Golhen